Marie-Christine Levet, pionnière du Net français

Marie-Christine Levet est pionnière du Net en France : elle a lancé Lycos en France, puis a dirigé Club Internet. Cette ex-présidente de l’association des FAI est maintenant à la tête de Jaina Capital, une société d’investissement spécialisée dans les nouvelles technologies, également membre du conseil d’administration d’Illiade France (Free). Retour sur un parcours et conseils d’une pro pour réussir dans la high-tech aujourd’hui.

Marie-Christine vous pouvez être considérée comme un exemple de réussite au féminin dans le monde du Web : de Lycos, à Illiad en passant par Groupe Test (01 Net) vous avez un beau parcours dans le monde de la high-tech et des finances. Pourquoi avoir choisi cet univers en particulier ?

Marie-Chrisitine Levet : J’ai découvert l’internet en 1997 et j’ai été fascinée … même si à cette époque les connexions étaient lentes et que l’on ne pouvait imaginer l’avenir de ce média, j’étais convaincue d’assister à une révolution et que cela allait révolutionner la manière dont on s’informait, dont on communiquait, dont on consommait….
J’ai eu envie de vivre “l’Aventure Internet” avec un grand A car à l’époque la plupart de mes camarades et collègues m’avertissaient “n’y va pas, cela ne va jamais décoller”. Par ailleurs, cela correspondait à un stade de ma vie professionnelle où après des expériences dans des grands groupes américains, j’avais envie d’une aventure plus entrepreneuriale, et quoi de mieux que de se lancer dans un nouveau secteur pour avoir à tout construire.
Je surfais beaucoup sur les sites américains, à l’époque Lycos, Yahoo… Et j’ai vu tomber une dépêche comme quoi Lycos US voulait entrer en Europe et former une joint-venture avec Bertelsmann pour lancer Lycos dans divers pays européens. Je me suis dit c’est le dream job, j’ai réussi à contacter la personne qui s’en occupait grace à un jeu de liens hypertextes et quelques semaines après je démarrais Lycos France de la page blanche.

Au moment de la bulle, vous avez continué votre trajectoire digitale, persuadée que le Web avait de l’avenir. Qu’est-ce qui vous a fait croire en cela ?

J’ai connu l’Internet à ses tout débuts en France, j’ai vu la bulle gonfler et… dégonfler tout aussi rapidement… Ce qui ne m’a guère étonnée car à un moment on avait atteint des niveaux complètement irrationnels en matière de valorisation de société ou d’apparition de startups sans modèles… Mais c’était une bulle financière, et non pas une bulle d’usage… Les utilisateurs étaient de plus en plus nombreux et faisaient de plus en plus de choses par internet… Ce qui n’a fait que s’amplifier notamment grâce à l’arrivée du haut débit qui permettaient des connections ininterrompues à grande vitesse et a fait décoller les usages.

Concilier votre vie de cadre hyperactive et exigeante avec une vie de famille, cela n’a pas été trop difficile ? Que dites vous à ceux qui croient que les femmes s’investissent moins dans leur carrière ?

Je ne crois absolument pas à la différence hommes/femmes… Dans toutes mes expériences professionnelles, j’ai rencontré des femmes d’un très grand professionnalisme qui s’investissaient tout autant, voire souvent plus que leurs collègues masculins mais souvent le disaient moins et se vendaient moins.. C’est là la grande différence hommes/femmes !
Les difficultés arrivent avec l’arrivée des enfants où par tradition, même si les sociétés changent doucement, les tâches liées à l’éducation des enfants incombent souvent plus à la femme et où tout simplement la femme a envie de passer du temps avec ses enfants et ne pas traîner le soir au bureau, moment pendant lequel les hommes excellent souvent en politique… Et là, les femmes doivent souvent faire des choix.
J’ai eu la chance, en ayant démarré dans ce nouveau secteur qui était l’Internet et qui était plus ouvert et moins traditionnel que des secteurs plus classiques, d’avoir des responsabilités très jeunes (je gérais 500 personnes chez Club Internet à 35 ans) avant d’avoir des enfants…
Aujourd’hui que j’ai des enfants, j’ai la chance d’avoir un métier d’investisseur passionnant qui me permet de rencontrer à longueur de journée des entrepreneurs dynamiques et de passer du temps avec mes enfants, grâce notamment à tous ces nouveaux gadgets sans lesquels on ne peut plus vivre (Iphone, ipad…) qui certes vous mettent un fil à la patte mais vous accordent une liberté exceptionnelle…

Comment voyez-vous le Web de demain ? Qui écoutez-vous, ou lisez-vous en priorité pour conseiller vos clients ?

C’est difficile de ne pas tomber dans des généralités, le web de demain sera multi-supports (pc, mobile, télés connectées, tablettes), multifonctions (social, éditorial et commerce seront intimement liés) ?…
Je lis beaucoup la presse en ligne (Techcrunch, sai, venturebeat aux US, frenchweb en france) et utilise beaucoup Twitter comme source d’informations sur ce secteur (principalement pour suivre ce qui se passe dans la Silicon valley). J’apprends souvent les news par twitter… Même si je ne tweete pas beaucoup (question de génération ;-))

Quelles conseils donneriez-vous à celles et ceux qui voudraient marcher sur vos traces aujourd’hui ? Un secteur d’avenir dans la high-tech sur lequel miser ?

Je leur dirais qu’au lieu de lancer le Nième site Groupon en France, qu’ils explorent des secteurs encore peu développés. Beaucoup de choses vont se passer autour des télés connectées, de l’édition numérique, les liens entre devices seront de plus en plus transparents et nous n’en sommes qu’au début de ce que les réseaux sociaux vont nous permettre de faire…

De la même manière, que conseillez-vous aux entrepreneurs des startups ?

Je leur conseillerais avant tout d’être pragmatiques et low cost : l’essentiel est souvent de tenir. La plupart des succès dont tout le monde parle sont des aventures de 10 ans : Auféminin, Price Minister, Free, Meetic…
10 ans pendant lesquels ces entrepreneurs ont su tenir et évoluer. Il faut savoir faire évoluer son modèle, s’adapter… Quand nous choisissons des projets dans lesquels nous allons investir, bien sur nous misons sur une idée et un marché mais avant tout sur une équipe complémentaire qui saura faire évoluer son modèle. Mieux vaut une très bonne équipe avec une idée qui devra évoluer qu’une équipe moyenne avec une très bonne idée… L’arrogance, les idées reçues sont à bannir dans ce secteur.

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