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Le principe premier d’un média social est de rassembler des communautés par affinités amicales ou par intérêts culturels semblables. A une époque pas si lointaine, le bouton « like » était réservé aux photos, vidéos ou statuts. A présent, l’aspect social à caractère amical et désintéressé est révolu : il a pris une tournure professionnelle où l’intérêt commercial et l’enjeu économique sont désormais de la partie. Facebook a donc monétisé son modèle, transformé son réseau en un vivier de consommateurs potentiels…

Dossier en trois parties:
1er volet : LE « LIKE » A LA CONQUÊTE DU WEB : LA DÉFERLANTE
2e volet : LA COURSE AUX « LIKES »
3e volet : APRÈS L’EUPHORIE L’ENVERS DU DÉCOR

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2e volet : LA COURSE AUX « LIKES »

a) L’arrivée de L’Open Graph

La recommandation sociale est devenue un gage de vente et de pages vues. Dès lors, Facebook a élargi la possibilité de « liker » tout type de contenus : des produits, des commentaires, une mise en relation, un article, une page fan. On « like » à tout va, tout et n’importe quoi, pour augmenter la visibilité d’une personne et surtout d’une marque. Et c’est loin d’être fini…
D’où la naissance de l’Open Graph, une API que Facebook a placé au centre du web social. Des sites web, produits, lieux, marques, vidéos, photos deviennent des « objets Facebook » et sont intégrés et référencés au graphe social, interagissant avec Facebook. L’Open Graph montre ainsi la relation entre ces divers « objets Facebook » qui sont devenus des maillons de la chaine sociale.

Avant un «facebooker » était :

  • ami avec X
  • fan d’une personnalité
  • ou membre d’un groupe

Strictement « humain », le social graph était basé sur les relations entre individus.

Aujourd’hui, ce modèle est dépassé avec l’Open Graph : les interactions s’ouvrent aux « objets ». On découvre qu’un facebooker :

  • aime telle marque, tel article de magazine
  • était à tel endroit (Foursquare)
  • joue à tel jeu
  • écoute tel morceau, etc.

En révélant les intérêts d’un utilisateur grâce au bouton « like », Facebook crée par la suite des connexions entre ces centres d’intérêts. Et toutes ces données pourront être utilisées par les éditeurs de site dans leur stratégie marketing ¹, d’où l’engouement pour « like », le « button killer »!

b) Un nouvel enjeu

Un clic sur le bouton « J’aime » suffit à devenir en 1/4 de seconde, membre d’une communauté, de montrer à son réseau l’adhésion pour une marque et donc d’être fan. Car tout « j’aime » s’affiche instantanément sur le mur et le fil d’informations d’un profil Facebook. Et au regard des chiffres les internautes sont loin d’y être réticents (Starbuck : 5 millions de fans, Nutella 3, millions). Ce bouton quantifie pour la première fois la popularité d’une marque et la rend visible aux yeux du monde.² C’est un fait unique dans l’histoire de disposer d’un tel outil de mesure. Déclarer qu’on aime « les Hôtels Ibis » « Leroy Merlin » ou « Auchan » est assez bien intégré, nullement considéré comme un comportement relevant d’une fantaisie ou d’une lubie. Il serait bien sot de se refuser un tel rayonnement. Ne faisant ni une ni deux, les marques ont créé promptement leur page et donc un lien direct auprès de leurs potentiels consommateurs.
Facebook renouvelle les mœurs en intégrant ses propres codes web 2.0 : « aimer » n’est plus réservé à des hobbies ou à des passions. Et Mark Zuckerberg l’a bien intégré et mis à profit dans son Open Graph. Mais ne nous leurrons pas: la notoriété affichée sur Facebook n’est pas calquée sur la représentation du monde réel. Ce sont les personnes adeptes des réseaux sociaux qui cliquent…
Encore une fois, la balance est un peu faussée mais qu’importe. Le volume de « likes » donne une indication publique à la manière d’un baromètre de l’attachement portée à une marque.

c) Intérêts pour les marques

Dès lors, l’utilisation des médiaux sociaux par les marques intégrées au cœur de l’Open Graph, permet de :

  1. Recruter et fédérer autour de la marque. Atteindre une population non touchée par les médias traditionnels. Par l’intermédiaire de leur page fan, les marques sont proches des consommateurs de manière informelle.
  2. Générer du trafic
  3. Gérer leur e-réputation en véhiculant au possible une image positive, augmenter leur notoriété et leur taux de fidélisation
  4. Lancer ou promouvoir de nouveaux produits
  5. Générer du chiffre d’affaire (l’air de rien…)

Et donc, vous l’aurez compris, les marques courent après les « likes » et donc les fans.³ Et tous les moyens sont bons pour en obtenir. On privilégie la supériorité numérique à la qualité d’une communauté active. Une notion de mesure qui en dit long sur le besoin d’être le mieux pourvu…

d) Comment les marques et autres sites poussent-elles les utilisateurs à « liker » ?

L’intérêt est loin d’être le seul critère. La course effrénée aux « likes » fait qu’on ne vient pas toujours par soi-même. Les marques usent d’astuces comme :

  • diffuser des mailings à sa base d’inscrits pour inciter à « liker » une page
  • accéder à un jeu concours, où l’utilisateur doit « liker »
  • voter : le « like » est utilisé comme une voix. ( Concours Black XS)
  • l’affichage de messages en « overlay » sur l’ouverture d’un site pour obtenir des « likes »
  • visualiser une vidéo : l’internaute clique sur un bouton « like » déguisé en faux bouton « play ». Cette manœuvre s’appelle du « phishing » ou du «Likejacking». Une méthode assez abusive pour décupler les « likes ».

Et donc les moyens n’étant pas toujours très honnêtes, les internautes cliquent sur « j’aime » parfois à l’insu de leur plein gré… Désormais, vous ne « likerez » plus comme avant…

Suite dans le prochain volet : « Après l’euphorie, l’envers du décor »

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¹ Vous pouvez aussi télécharger toutes vos données enregistrées sur Facebook. Plus d’infos ici.

² A savoir : pour connaître la liste des sites les plus « likés » et donc les plus sociables sur Facebook entre le 5 et le 16 septembre 2011, le journal du net a publié ses classements.

³ A une époque pas si lointaine, on « devenait fan d’une page », et aujourd’hui « on like une page ». Facebook est champion pour changer ses wording et fonctionnalités plus vite que la vitesse du son

© Crédits images : Aurélie Sadoine