Startup Week-End

S’il ne fallait retenir qu’une valeur du Startup Week-end, c’est bien celle-ci :
« Apprends, chute et recommence »

C’est ce qu’est venu tester une centaine de personnes le week-end du 8, 9 et 10 octobre 2010 à Paris. Depuis le vendredi 17h et ce durant 54H, les cerveaux et les redbull ont carburé pour présenter en 5 minutes le dimanche soir le projet d’une startup la plus prometteuse.

Le pitch : convaincre que ton idée est la meilleure, en une minute

46 pitchs d’une minute ont été écoutés très solennellement dans l’amphi principal pour ensuite constituer une sélection d’une quinzaine de projets à l’issue d’un vote par les acteurs du week-end.

Startup Week end Paris Octobre 2010 - Les 46 pitchs de démarrage

Startup Week end Paris Octobre 2010 - Les 46 pitchs de démarrage

« Cherche développeeeeeeur !  » « Cherche graphiste ! »

Et c’est ensuite le moment de constituer les équipes, dans le plus grand chaos. Certains recherchent avec grande peine des développeurs (on l’apprendra plus tard, tous partis se réfugier dans le projet « Qualifeed » avec pour base Twitter), d’autres pleurent le manque de graphistes au point d’essayer de me soudoyer avec de la nourriture. (en vain, je ne me suis pas payé la balance du geek absolu pour manger n’importe quoi, non mais ! 😉 ).

Pour ma part, j’étais venue pour m’amuser en m’associant au projet qui me semblait le plus humain et qui tentait de résoudre un réel problème de la vie de tous les jours. Les pitchs suvants avaient retenus mon attention :

  • n°4 : After the week-end : un moyen ultra simple de rassembler les photos d’un événement éparpillées sur des plates-formes de photos différentes.
  • n°11 : Une solution pour louer les services d’un expert dans un domaine très précis afin de le prendre comme responsable d’un recrutement dans un domaine dans lequel on n’est absolument pas compétent
  • n°12 : Un système pour améliorer la mise en relation des babysitters et des parents
  • n°18 : Reputeo, réfléchir à un moyen pour que les clients d’hôtels et de restaurants puissent noter l’établissement directement en présentant un Ipad  au moment du paiement de la note
  • n°36 : Un projet atypique et poétique qui proposait d’utiliser la Réalité Augmentée pour laisser des messages virtuels dans le monde.
  • n°39 : Développer une solution pour géolocaliser les objets que l’on perd souvent.
  • n°44 : Géolocaliser les services à la personne autour de chez soi.

Et c’est finalement le projet #12 que je rejoins, pour essayer de créer une application mobile pour les babysitters et les parents. Un challenge important quand on sait que les parents sont plutôt réticents à laisser leurs enfants à quelqu’un qui ne leur a pas été recommandé…

Les cerveaux à bloc, c’est l’heure du brainstorming

Nous sommes vendredi, autour de 22h, et les 9 membres de l’équipe du projet #12 se retrouvent en salle 102 pour discuter des pistes à réfléchir. Les idées fusent et l’ambiance est électrique : dans toutes les équipes, l’excitation monte et on sait que le compte à rebours est lancé. Plus que 43h pour présenter la startup au jury.

Telecom Paris ferme à minuit vendredi soir. Et c’est donc en pleine séance de brainstorming que l’on se retrouve mis dehors, pour profiter de quelques heures de sommeil avant le gros rush des 2 jours à venir.

Là pour bosser le projet mais pas que

La journée de samedi démarre vers 9h avec un petit déjeuner dans le hall principal, avec toutes les équipes réunies. L’ambiance est conviviale. J’ai du mal à me dire qu’il y a une compétition dernière tout cela, tellement chacun prodigue ses conseils et s’interroge sur les problématiques des autres groupes. Les discussions sont agréables et constructives, mais il faut s’y remettre. La gloire n’attend pas 😉

Le projet Yooppies et ses défauts

Le projet n°12 avance et se nommera Yooppies. Ne me demandez pas pourquoi. Pour ma part, le nom est mal choisi, ne colle pas au produit proposé et surtout est très mauvais pour être diffusé par le bouche à oreille. Je n’ai toujours pas perdu mon honnêteté et l’équipe entend mes remarques. Mais le temps passe et on ne peut pas passer trop de temps sur chaque étape. C’est le jeu !

Après la pause déjeuner avec des pizzas (120 pizzas pour 90 personnes, waou !) c’est parti pour créer le logo, la charte graphique du site et réfléchir ensuite au business plan. C’est lors d’une pause dehors (mince, il fait si beau dehors, et on s’enferme devant des ordis, quel monde ! ), que nous vient l’idée de la communication à adopter : et si on partait du principe que les enfants se font garder et qu’en proposant des bons plans, on fait garder, en quelque sorte, aussi les parents ?

Le slogan sera donc : « Yooppies, le 1er site pour garder les enfants … mais aussi les parents! »

Rester concentré, le challenge n°1 pour une startup

Depuis le début, l’idée d’associer des bons plans et des deals/promotions à destination des parents en plus de l’outil de babysitting ne me plait pas beaucoup. En plus de ma passion assez limitée pour les dispositifs voués à générer plein d’argent en dépit de la qualité du service, je suis de ceux qui pensent qu’on n’est que meilleur en restant concentré. Focus-focus-focus 😉 Mais la réussite de l’équipe me tient à cœur et en adoptant ce concept de parents babysittés, je pense qu’on peut essayer de mieux gérer le lien entre le babysitting et les bons plans/deals. Faute de mieux…

La pause dîner nous fait retrouver les visages un peu plus concentrés des travailleurs acharnés. Chacun commence à croire à fond à son produit, ou au contraire, à ne plus y croire et à décider de changer d’équipe ou de profiter du reste du week-end en passant d’une équipe à une autre pour conseiller un peu tout le monde. Je repars vers 1h du matin après avoir produit un logo, 2 pages de site et 1 page de l’application mobile.

Je mets le nez dans la réalité

Le trajet en voiture sur le périphérique avec d’autres gens et un accident qui me bloque presque une heure me font prendre conscience qu’il y a d’autres gens en dehors de la bulle startup week-end. Et qu’on est samedi, ah oui c’est vrai. D’autres ont passé la soirée dans les bars et se crashent sous un pont du périph’. Et j’apprécierais bien d’arriver à la maison et dormir quelques heures.

La prise de recul indispensable

Dimanche. Il est 10h30 et je me réveille. La veille en me couchant, je me rends compte que je n’ai plus vraiment envie de finir le projet Yooppies. L’idée de base s’est diluée dans un projet qui me concerne beaucoup moins avec les deals et les bons plans. Mes remarques sur l’inadéquation du nom et le besoin de rester concentré sur une problématique à la fois n’ayant pas été intégrées, je me sens un peu déçue. J’aurai aimé réussir à conserver l’excitation du premier soir où tout nous parait possible. Qu’on va y arriver, et même résoudre un problème pour d’autres gens. Sentir une cohésion d’équipe le temps d’un week-end. Mais je ne suis pas la seule à déserter un peu le navire. Il reste désormais 3 vaillants porteurs du projets, les 5 autres ayant donné ce qu’ils pouvaient et qui attendaient aussi sûrement autre chose, comme moi.

Je prévois cependant de ne pas rater la fin de cette expérience et j’y retourne manger de la pizza en très bonne compagnie pour le déjeuner.

Ne pas lâcher l’équipe

Les messages d’encouragements des 3 irréductibles restés dormir sur place me donnent tout de même envie d’aller fignoler la présentation avec eux et boucler 2 autres pages du site et une autre page pour l’application mobile. J’aurais fait tout ce que j’aurai pu, et le projet, bien que bancal, aura tout de même quelques bons aspects.

Le temps de faire un tour dans les autres salles pour sentir la tension plus ou moins palpable à 2h avant la fin et c’est l’heure de rejoindre l’amphi pour s’installer pour 3h de présentation.

Le moment tant attendu : la présentation des startups

L’ambiance est mélée de fatigue et de stress. Mais un de nos maîtres de cérémonie, Franck, saura en quelques mots nous redonner le moral : « Vous n’êtes pas ici pour créer une startup parfaite. Vous êtes là pour expérimenter, pour apprendre, comprendre vos erreurs et recommencer demain. Vous êtes stressés pour un projet que vous n’aviez même pas imaginé il y a encore 3 jours. Alors no stress. Peu importe qui gagne, les bonnes idées et les bons projets pourront exister même s’ils ne sont pas premier. Et si vous vous rendez compte que le projet est parti dans une mauvaise direction ou n’est pas viable, c’est pas grave : jetez tout et recommencez. Lundi et mardi, vous faites quoi ? Bah créez une nouvelle startup. Mercredi et jeudi ? Une nouvelle startup. Vendredi et samedi ? Une nouvelle startup ! »

Startup Week End, les présentations finales

Startup Week End, les présentations finales

Et c’est bien là que je trouve l’expérience la plus intéressante. On a le droit de se planter lors d’un week-end. Ce sont seulement 2 jours de notre vie, si on a mal jugé les choses, le projet, le potentiel, l’équipe, ce n’est pas dramatique. On vient de vivre le démarrage d’une startup en accéléré. En principe, cela peut prendre beaucoup plus de temps avant de se rendre compte des erreurs dans le projet. C’est une super chance de pouvoir tester comme cela des idées, des équipes, un nouveau rôle dans un groupe etc…

Startup Week End, les présentations finales

Startup Week End, les présentations finales

Et des rencontres. Des discussions avec des gens pour la plupart avec un esprit ouvert et prêt à t’écouter, entendre ton opinion.

Alors oui, j’ai passé mon week-end à bosser. Et à bosser peut-être même plus qu’en semaine normale. Et sans être payée, avec ça. Mais, ah, qu’est-ce que c’est bon de se sentir exister ! De croire en soi, de réfléchir, de se poser les bonnes questions, de rencontrer et partager avec d’autres…

Après avoir entendu les 17 pitchs (5 minutes de présentatoin puis 5 minutes de questions/réponses) le jury délibère en prenant en compte les 3 critères WIE :

  • Waou. L’effet Waou, tant au niveau du fond que de la forme.
  • Investissement. Si le jury serait prêt à investir dans la startup.
  • Equipe. Le ressenti de l’esprit de l’équipe et des compétences.

Lors du passage de Yooppies, les questions soulevés par le jury sont assez prévisibles et on constate aussi une crainte à vouloir lancer 2 produits en même temps, et les parents du jury signalent leur crainte et manque de confiance de recruter une babysitter par internet (malgré le système de recommandation prévu) et aussi les habitudes des parents à ne pas donner les coordonnées de leur babysitter de peur qu’elle ne devienne trop demandée et qu’il ne puisse plus compter sur elle. Des soucis à dénouer et qui auraient pu être plus étudiés lors du week-end, selon moi. Le jury soulèvera aussi la difficulté à faire venir des parents et des babysitters sur le site. Et sans babysitters ou sans parents, le site est inutile…

Au final, c’est l’équipe de Reputeo.us qui gagne le concours avec leur système de notation des hôtels et restaurants directement au moment du paiement de la note. Leur projet nécessitera un gros coup au démarrage au niveau matériel mais aussi éducatif et culturel mais c’est justement ça qui est grisant. Il y a un problème ? Allez, à nous tous, on va trouver une solution.

Startup Week End, les 4 équipes finalistes et le jury

Startup Week End, les 4 équipes finalistes et le jury

Vient ensuite (ex-aquo il paraît, selon les rumeurs sur tweeter ?) le projet BreizhBook, un réseau social pour les bretons. Quelle énergie Corentin ! J’y crois, et normande de souche, je me demande si cela peut prendre dans d’autres régions comme la côte basque, la Corse, l’Alsace … ou si seuls les bretons sont aussi chauvins ?

En 3ème position c’est AfterTheWeekEnd, le système de rassemblement de photos éparpillées sur les plates-formes de photos online. Joli outil déjà développé et qui peut avoir sa place. Là aussi, ce n’est pas évident de faire venir les gens à utiliser « encore » un nouvel outil. Un challenge à relever.

Enfin, Bet2buy, un système de loterie pour acheter pas cher et vendre plus cher ses objets, basé sur un tirage au sort. Le système ne m’est pas vraiment familier mais à voir car cela semble être en plein essor aux USA (si j’ai bien suivi). L’équipe déborde d’énergie même après ces longues heures de travail.

A noter la prestation de l’équipe The Very Big Timer qui, après un constat dramatique que le produit qu’ils voulaient développer existait déjà, ont su rebondir et présenter un produit qui a mis le feu à l’amphi. Un mélange de kama sutra et de twister où l’Iphone indique à intervalles réguliers les positions à pratiquer. Complètement délire et le jury leur a même conseillé de voir si, en fait, ce ne serait pas une bonne idée à gratter un peu plus. Chapeau ! La vidéo est visible ici sur le site 1minute2success.

La vidéo des pitchs sera en ligne prochainement, je rajouterai le lien dès que je l’aurai.

Retour à la vie normale

La soirée et le week-end se terminent par un buffet englouti en 5 minutes et quelques coupes de champagne. Les cartes de visite s’échangent, certains discutent déjà de la suite du projet dont ils n’avaient même pas connaissance il y a 54h. Pour ma part, je vais voir comment et si le projet Yooppies grandit et si les critiques que je peux en faire sont étudiées. Encore des discussions et des rencontres et c’est l’heure de reprendre le chemin de la maison.

Sous le pont de la porte d’Auteuil, plus une seule trace de l’accident se la veille. Retour à la vie normale.

Précédemment publié sur La boite à monocle de Sophie Masure.